Les îles que les Athéniens possèdent dans le voisinage du continent sont, celle de Patrocle dont j'ai déjà parlé ; une autre au-dessus du promontoire Sounion qu'on laisse à gauche en naviguant vers l'Attique ; Hélène y débarqua, dit-on, après la prise de Troie, et l'île a pris pour cette raison le nom d'Hélène. Salamine située devant Eleusis s'étend jusqu'au vis à vis de la Mégaride ; ce fut Cychrée qui lui donna le nom de Salamine sa mère, fille d'Asopos ; les Aeginètes vinrent ensuite s'y établir avec Télamon ; Philaeos, fils d'Eurysaces, fils d'Ajax, ayant été fait citoyen d'Athènes, l'a donna, dit-on, aux Athéniens. Les Salaminiens furent chassés de cette île, plusieurs siècles après, par les Athéniens, qui les accusaient de s'être laissés vaincre exprès dans la guerre contre Cassandre, et d'avoir rendu leur ville aux Macédoniens de leur plein gré et sans y être forcés. Les Athéniens condamnèrent aussi à mort Askètades, qui avait été nommé général des Salaminiens, et jurèrent de ne jamais oublier leur trahison. On voit encore à Salamine les ruines de la place publique, le temple d'Ajax avec sa statue en bois d'ébène, et les Athéniens lui rendent toujours le même culte, aussi qu'à Eurysaces, à qui on a aussi érigé un autel à Athènes. On montre à Salamine, à peu de distance du port, une pierre, et les gens du pays disent que Télamon assis dessus, suivit des yeux le vaisseau qui emmenait ses fils à Aulis, où ils allaient joindre l'armée des Grecs. Les habitants de Salamine disent que la fleur qui porte le nom d'Ajax parut pour la première fois dans leur île lors que ce héros mourut. Cette fleur est d'un blanc tirant sur le rouge, de la même forme que le lys, mais un peu plus petite. Ses feuilles sont aussi moins grandes et elles offrent les mêmes lettres que les Hyacinthes. Les Eoliens qui ont repeuplé Ilion dans la suite, racontent au sujet du jugement des armes, qu'Odysseos ayant fait naufrage, les flots apportèrent les armes d'Achille vers le tombeau d'Ajax. Voici, d'un autre côté, ce que j'ai appris d'un habitant de la Mysie sur la taille de ce héros. La mer en baignant son tombeau l'ouvrit du côté du rivage, ce qui rendit facile l'accès à l'endroit où était le corps, et pour me donner une idée de sa grandeur, il me dit que l'os de son genou que les médecins nomment la rotule, était aussi grand que le disque dont les Athlètes enfants se servent pour le Pentathle. J'ai vu des Celtes de ces contrées reculées, voisines de celles qu'on ne peut plus habiter à cause du froid : la taille de ces Celtes qu'on nomme les Cabares, n'a rien d'extraordinaire et n'excède pas celle des corps que j'ai vus en Egypte. Voici ce qui m'a paru le plus extraordinaire en ce genre. Un certain Protophanes Magnésien des bords du Léthé remporta dans le même jour le prix de la lutte et celui du pancrace aux jeux olympiques. Des voleurs ouvrirent son tombeau dans l'espoir d'y trouver quelque chose à dérober, et comme ils ne le refermèrent pas, plusieurs personnes y entrèrent ensuite par curiosité. On remarqua que ses côtes n'étaient point séparées, et ne formaient qu'un seul os depuis l'épaule jusqu'aux plus petites côtes, que les médecins appellent du nom, de fausses côtes. Il y a devant la ville de Milet une île nommée Ladé, de laquelle se détachèrent jadis deux petites îles, dont l'une se nomme l'île d'Astérios, parce qu'Astérios, qui passait pour fils d'Anax, fils de la Terre, y fut, dit-on, enterré. Le corps de cet Astérios n'a pas moins de dix coudées de long. Voici encore ce que j'ai vu d'étonnant dans une petite ville de la Lydie supérieure, nommée les Portes de Téménos ; une colline du voisinage s'étant fendue par la rigueur du froid, on y aperçut des ossements d'une grandeur si démesurée, que sans leur forme, on n'aurait guère pu croire qu'ils eussent appartenu à un homme. Le bruit se répandit aussitôt dans le pays que c'était les os de Géryon, fils de Chrysaor. On croyait reconnaître son trône dans un rocher d'une montagne voisine, taillé en saillie et ressemblant à un siège. On donnait le nom d'Océan à un torrent qui coule auprès ; et comme, suivant la tradition, Géryon avait des boeufs d'une très grande beauté, on assurait que quelques personnes avaient trouvé des cornes en labourant. Je me permis de les contredire en leur prouvant que Géryon demeurait à Gadès ; que son tombeau n'y existe pas, mais qu'on y voit un arbre qui offre différentes formes. Alors les Exégètes Lydiens reconnurent que ce corps était celui d'Hyllos, fils de la Terre, qui a donné son nom au fleuve voisin : ils ajoutent qu'Héraklès, en mémoire de son séjour auprès d'Omphale, donna à son fils le nom de ce fleuve. |
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